« Saint Paul écrit dans son Épître que nous n'avons
pas trouvé ici bas de demeure fixe. Nous cherchons une demeure future
et c'est pourquoi nous sommes semblables au pèlerin et traversons le monde
d'ici-bas jusqu'à ce que nous arrivions dans notre patrie qui est la béatitude éternelle.
Si nous voulons y parvenir, il faut que nous ayons les qualités et les
dispositions qui sont celles d'un pèlerin et que nous agissions comme
le fait un pèlerin. C'est pourquoi je me suis proposé d'étudier
vingt qualités et dispositions que doit posséder un pèlerin
qui est un véritable pèlerin chrétien, lorsqu'il veut aller
au lointain Saint-Jacques ou à Rome pour obtenir la grâce divine
et la rémission de tous ses péchés, car lorsqu'on veut partir
pour un aussi long voyage, quiconque prépare ce dont il aura besoin en
cours de route ». |
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La première obligation du pèlerin est de régler ses
dettes envers Dieu et envers les hommes. La précaution n'est pas superflue,
car nul ne sait s'il reviendra ou s'il mourra en chemin. La première
chose à faire est donc de confesser tous ses péchés et
de se repentir. L'essentiel étant de demander à Dieu de pardonner
au pénitent comme lui même pardonne à son prochain. Lorsque
tu es redevable à ton prochain d'une chose quelconque, quelle qu'elle
soit, tu dois la lui restituer aussi vite que tu peux, sans le tromper ni la
garder contre sa volonté. |
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La seconde obligation d'un pèlerin raisonnable est de faire lui-même un testament concernant son corps et tous ses biens à commencer par son âme. Et qu'il s'arrange de manière à ce que ce soit fait lorsqu'il partira pour le long chemin, et qu'il mette en ordre sa vie de telle sorte qu'elle soit juste quand son compagnon, qui est la mort, voudra l'emmener |
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La troisième obligation d'un pieux voyageur est de prendre congé de
toute sa maisonnée, en lui recommandant d'être parfaitement soumise
aux ordres de son épouse. Il ne se laisse pas abattre par les pleurs,
mais s'en va droit devant lui. Le pieux pèlerin chrétien qui a
la volonté d'aller dans le pays du père, c'est-à-dire dans
la béatitude éternelle, doit aussi donner congé à sa
maisonnée, c'est-à-dire à sa sensualité, mais les
pleurs de celle-ci ne doivent pas le détourner. La femme qui doit commander
en son absence, c'est la raison. |
Ces trois obligations qui résultent de la coupure avec le monde quotidien
liée au thème du départ sont suivies de sept conseils portant
sur les préparatifs du voyage proprement dit. |
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La quatrième obligation d'un voyageur est de faire confectionner un
bon sac en cuir dans lequel il met tout ce dont il a besoin pendant son voyage
et qui l'accompagne personnellement, ou bien s'ils sont en groupe, ils donnent
le sac au plus fort et c'est lui qui doit le porter pour tout le monde. Dans
ce sac ils ont un briquet de manière à allumer une bougie pendant
la nuit où un feu pour se réchauffer. Et ils ont aussi une petite
pharmacie pour le cas ou l'un tombe malade et à besoin de se fortifier
pour continuer sa route. Il y met aussi une bouteille de vin, du pain et tout
ce qu'il faut. Le contenu du sac représente la foi vivante, l'Église
est la besace et le Christ le remède. |
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La cinquième obligation du pèlerin est de faire
confectionner une paire de bonnes chaussures* et de ne pas les utiliser toutes
neuves mais
seulement après les avoir portées. Elles doivent être fermées
sur le dessus afin qu'aucun immondice du chemin, à savoir les innovations
de l'hérésie, n'y pénètre et que le pèlerin
puisse marcher d'un pas ferme. C'est ainsi qu'il progressera sur le chemin
de la vie éternelle.
* Une variante indique que le pèlerin doit se munir d'un couteau pour
le voyage
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La sixième obligation du pèlerin est d'acheter un chapeau bien
large et tout rond, susceptible de le protéger qu'il pleuve ou non, et
ce chapeau est l'image de la patience dont il faut faire preuve dans l'adversité pour
demeurer dans le droit chemin. |
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La septième obligation est de faire un bon manteau qui le couvre entièrement
et le protège. Conscient d'être comme un étranger en ce
monde, le pèlerin doit marcher jusqu'à sa patrie éternelle
vêtu de ce manteau qui est la charité chrétienne. Car personne
ne peut entrer dans la béatitude éternelle sans ce manteau; qui
signifie qu'il doit aimer Dieu plus que toute chose et le prochain comme lui-même. |
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La huitième obligation est de prendre de l'argent avec soi, car c'est
une chose dont on a bien besoin. Arriver quelque part sans argent est le fait
d'un homme de rien. Il faut donc mettre de l'argent dans sa besace et une autre
partie dans son pourpoint, à l'endroit le plus caché. L'argent
est le symbole des épreuves, des peines, des désagréments
et des souffrances que Dieu a envoyées. Ce sont des moyens d'effacer
le péché et il ne convient pas de s'en glorifier. |
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La neuvième obligation consiste à prendre un bâton pour
s'appuyer dessus ou pour se relever. Ce bâton est l'image de l'espérance
que l'on doit avoir en Dieu qui ne veut pas la mort du pécheur. Le pèlerin
doit avoir son bâton en main et ne pas se le laisser prendre, car l'espérance
fait que les hommes marchent sur le chemin de Dieu sans se lasser. Le pèlerin
ne doit pas placer son espérance dans les biens de ce monde, ni dans
sa femme, ses enfants ou ses amis, car cela est fragile et ne sert point à son
salut. Il doit placer son espérance seulement en Dieu, bâton qui
ne se brise point. |
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La dixième obligation est de ne pas se surcharger inutilement d'habits,
de boissons ou de vivres, car cela incite à chercher une charrette sur
laquelle déposer ce fardeau qui l'encombre. C'est une souffrance pour
le corps et l'âme que d'être attaché aux biens matériels.
Il convient de les donner aux pauvres pour en être débarrassé et
de marcher d'un pas léger à côté de la charrette
vers le salut éternel. |
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La onzième obligation est de veiller soigneusement à avoir
une bonne compagnie de gens avec lesquels on s'avance joyeusement petit à petit,
et à avoir un compagnon qu'on a constamment auprès de soi sans
le quitter jamais, comme firent les deux compagnons d'Emmaüs qui en avaient
un troisième parmi eux et dirent : « notre cœur n'était-il
pas fervent tandis qu'il parlait avec nous en chemin », et c'est pourquoi
le chrétien doit avoir toujours Jésus-Christ avec lui. |
Suivent des obligations qui tiennent à la composante sociale du chrétien
dans le monde. |
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La douzième obligation d'un pieux pèlerin chrétien,
c'est le trésor qu'il porte sur lui et ne montre à personne sinon
il serait déraisonnable de porter de l'argent sur soi et de le montrer à tout
le monde quand on entre dans une auberge, car il pourrait se trouver un des
clients qui souhaiterait le dépouiller. Tu dois donc faire comme le pèlerin
raisonnable qui ne montre à personne son trésor. Qu'est-ce que
ce trésor ? Ce sont les bonnes œuvres qu'il ne faut montrer à personne
pour en tirer des éloges, sinon elles sont perdues. |
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La treizième obligation d'un pèlerin raisonnable consiste,
lorsqu'il vient dans une ville et que ses habitants se moquent de lui, c'est
d'être indifférent, de poursuivre son chemin sans se laisser abattre,
et si les autres rient de lui, il doit se joindre à eux pour rire de
lui-même. Ne pas se préoccuper du qu'en dira-t-on, ne pas se conduire
comme le cheval « ombrageux » qui a peur de son ombre. La mort est
proche et il ne faut pas se laisser détourner du chemin qui mène
au salut. |
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La quatorzième obligation d'un pèlerin est, lorsqu'il arrive
dans une ville ou la traverse où il y a déjà des danses
et des courses ou un mariage ou tout autres réjouissances avec des bains
etc. de ne pas se laisser arrêter et de poursuivre néanmoins son
chemin droit devant lui, s'il est raisonnable. Ainsi dois-tu faire si tu veux être
un vrai pèlerin chrétien, tu ne dois pas t'inquiéter des
joies du monde et dois penser : « Je veux économiser ma joie jusqu'à ce
que j'arrive dans le pays de mon père et c'est là que je veux
avoir mon plaisir et ma joie ». Ne serait-il pas un pèlerin déraisonnable
celui qui, traversant une prairie où se trouvaient plein de fleurs, s'assiérait
et cueillerait les roses et les fleurs, tandis que pendant ce temps un voleur
viendrait lui dérober sa besace ? |
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La quinzième obligation du pèlerin est de ne pas se presser
ou de ne pas aller trop loin le premier jour mais de commencer doucement, car
quand on veut aller loin, il ne faut pas vouloir en faire trop dans les débuts.
S'il exagère, il n'ira pas bien loin sur son chemin. Ainsi le chrétien
ne doit-il pas se rendre malade par des pénitences et des macérations
abusives. |
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La seizième obligation d'un pèlerin raisonnable est de ne pas
se demander quand il va à l'auberge ou à l'hôtel quelles
bonnes choses on va lui servir à manger et à boire et si on lui
en sert, il doit penser qu'il aura à le payer, parce qu'on le mettra
sur son addition. De même le chrétien doit-il être d'autant
plus humble qu'il reçoit davantage et qu'il devra en rendre compte. |
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La dix-septième qualité d'un pèlerin raisonnable consiste,
quoi qu'il lui arrive, et où que puisse être son corps, à penser
toujours à chez lui, et que tout ce qu'il voie lui soit une raison d'y
penser. Ainsi un pèlerin chrétien doit-il, quoi qu'il fasse, cherche
ou voie, y trouver une raison de songer à sa patrie céleste et
de ne pas faire comme les insensés à qui l'on donne une noix dont
l'écorce verte est encore autour, qui mordent dedans et la rejettent
parce qu'elle est amère, sans s'apercevoir qu'il y a dedans une partie
mangeable, ou encore à qui l'on propose un crabe qu'ils ne peuvent manger
tel quel, qu'ils refusent devenant par là la risée, comme font
les sots qui craignent fort les crabes et n'en mangent pas. Il n'en va pas autrement
lorsque Notre Seigneur envoie à quelqu'un des épreuves, il ne
convient pas de les repousser et de protester contre Dieu mais de penser que
celui-ci les envoie pour le salut de votre âme et que vous devez les supporter
patiemment. |
Biographie en allemand
figurant sur le site de la bibliothèque.
Johannes Geiler von Kaysersberg (1445-1510) studierte zunächst
an der Universität
Freiburg, wo er Mitglied des Rates der Artistenfakultät wurde. 1471 setzte
er sein Studium an der Universität Basel fort, wo er zum Dr. theol. promoviert
wurde. Auf Bitten der Freiburger Bürgerschaft übernahm er 1476 einen
theologischen Lehrstuhl an der dortigen Universität, deren Rektor er im
selben Jahr wurde. Nach einem Jahr seiner Universitätslaufbahn wandte er
sich jedoch der praktischen Seelsorge zu, zuerst in Würzburg, danach in
Straßburg. Diese Tätigkeit, die lediglich durch eine Pilgerreise
nach Südfrankreich im Jahr 1484 und eine mehrmonatige Predigertätigkeit
in Augsburg 1488 unterbrochen wurde, übte er bis zu seinem Tod aus. Der
Text der vorliegenden Ausgabe mit dem Titel "Der bilger mit seineneygenschaften" gehört
zu dem in Augsburg gehaltenen Predigtzyklus und wurde von Geiler selbst veröffentlicht.
Die in seinen Werken faßbare Theologie ist methodisch und inhaltlich scholastisch
geprägt und dürfte wohl dem Nominalismus zuzuordnen sein, zu dem sich
zugleich auch mystische Frömmigkeit gesellt. Geilers Popularität beruhte
darauf, daß er in seinen Predigten vielfältige Themen sowie Autoren
unterschiedlichster Richtungen und sogar weltliche Literatur verwendete,
wie sein Zyklus über Sebastian Brants "Narrenschiff" zeigt. Geiler
war zwar kein Humanist, übte jedoch Einfluß auf den oberrheinischen
Humanistenkreis um Brant und Wimpfeling aus.
Traduction fançaise de
L.M.
Jean Geiler de Kaysersberg (1445-1510) commença ses études à l'université
de Fribourg où il devint membre de la faculté des Arts. En 1471
il poursuivit ses études à l'université de Bâle
où il obtint un doctorat de théologie.
A la demande de la municipalité de Fribourg, il prit en 1476 une chaire
de théologie à l'université de cette ville dont il devint
recteur la même
année.
Pourtant après un an de cette activité il se tourna vers le soin
des âmes, d'abord à Würzburg puis à Strasbourg. il
exerça cette activité jusqu'à
sa mort, à
l'exception d'uin pèlerinage dans le sud de la France en 1484 et d'une
prédication
de plusieurs mois à Augsburg. Le texte de son ouvrage "Le pèlerin
et ses qualités" qu'il a publié lui-même, appartient à ses
prédications d'Augsburg.
La théologie qui ressort est méthododique et son contenu est
imprégné
de
scholastique et pourrait être rangé dans le nominalisme tout en étant
accompagnée d'une piété mystique. La popularité de
Geiler repose sur le fait que ses
sermons abordent de nombreux thèmes et auteurs de différentes
directions de même que la littérature mondiale, colmme son cycle
sur la "Nef des
fous" de Sébastien Brant le montre. Geiler n'était cependant
pas un humaniste mais
exerça cependant son influence dans les cercles humanistes du Haut-Rhin,
autour de Brant et Wimpfeling.
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